La CPI semble avoir des difficultés à communiquer
La Cour est accusée de faire trop peu pour informer les gens en Afrique sur son travail.
La CPI semble avoir des difficultés à communiquer
La Cour est accusée de faire trop peu pour informer les gens en Afrique sur son travail.
La CPI est basée à La Haye aux Pays-Bas, à des milliers de kilomètres des pays dont elle s’occupe: Ouganda, République centrafricaine, CAR, Soudan et République démocratique du Congo, RDC.
C’est en RDC – le pays qui compte le plus d’inculpés devant la CPI – que les voix du mécontentement sont les plus fortes.
L’IWPR a interwievé des journalises, avocats et activistes de la société civile congolais qui disent que les gens sur place ont peu d’idées sur ce qui se passe à La Haye.
A ce jour, la CPI a initié des procédures contre cinq Congolais et les enquêtes continuent. Le chef de milice d’Ituri Thomas Lubanga est actuellement en procès, alors que Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui, également originaires d’Ituri, vont prendre place sur le banc des accusés en septembre.
Juste après, le procès de l’ex vice-président Jean-Pierre Bemba devrait commencer. Seul le chef rebelle Bosco Ntaganda est toujours en liberté.
Répandre des informations sur ce qui se passe à La Haye en RDC, un pays grand comme l’Europe de l’ouest, est un défi peu enviable.
La Cour a donc concentré ses efforts sur la province de l’Ituri, organisant des conversations quotidiennes interactives de deux heures avec huit stations de radio communautaires sur place.
Mais les journalistes disent que l’attention doit se porter ailleurs.
AUTRES INQUIÉTUDES
Faustin Kuediasala, du quotidien Le Potentiel basé à Kinshasa, déclare que parce qu’il n’y a qu’un faible accès aux informations sur la Cour, l’intérêt qui lui est porté diminue, “Les Congolais ont d’autres soucis que la CPI.”
C’est pour atteindre des gens comme Kuediasala que l’Unité de sensibilisation et d’information du public de la Cour a été mise en place. Quatre personnes chargées de la sensibilisation et de l’information sont basées à La Haye et six en RDC, qui s’assurent que les communautés affectées comprennent et puissent suivre le travail de la Cour.
Après une longue bataille pour trouver les bonnes personnes (un des postes a du être republié cinq fois) il y a maintenant deux officiers de sensibilisation à Bangui, la capitale de la RCA. Deux personnes travaillent sur la sensibilisation au Darfour – surtout à partir de camps de réfugiés au Tchad – et cinq en Ouganda.
Ils sont assaillis de problèmes logistiques. Atteindre les communautés affectées, qui se trouvent souvent dans des poches de violence continue, est souvent considéré trop risqué.
Même la Cour indique que le budget annuel pour la sensibilisation et l’information de 650 000 euros (910 000 US dollars) ne suffit pas.
“Il doit être très clair qu’avec les ressources limitées dont nous disposons, nous pourrons seulement seulement conduire des opérations de sensibilisation très limitées. Nous voulons le faire, mais si les États ne nous donnent pas assez de ressources, nous pourons seulement faire ce que nous serons en mesure de faire,” a indiqué Claudia Perdomo, chef de l’Unité de la sensibilisation de la CPI.
Mais les activistes sur le terrain disent que le budget limité de la Cour est mal dépensé et que les programmes de sensibilisation visent les mauvaises personnes, laissant ceux qui ont besoin d’apprendre sur la Cour dans l’ombre.
NORD KIVU
Ce problème semble être le plus marqué dans la province du Nord Kivu ravagée par la guerre. La zone a été rongée par les conflits au cours des dernières années et les Procureurs de la CPI ont lancé une enquête sur les crimes de violence sexuelle, le recrutement d’enfants soldats et la circulation illégale d’armes.
Les Procureurs ne desserent pas les dents au sujet des progrès et les quatres officiers de sensibilisation de la CPI basés à Kinshasa et Bunia ne se sont rendus au Nord et au Sud Kivu que quelques fois.
A Goma – la capitale régionale du Nord Kivu – les journalistes disent qu’ils n’ont pas assez d’informations sur la Cour, et qu’ils ont du mal à fournir des informations à la population.
“Il y a deux ans, un journaliste de Bujumbura m’a apporté un tract qui parlait de la CPI. C’est la seule occasion où j’en ai entendu parler,” indique Primo Pascal Rudahigwa, responsable de programme à la station RTNC de RDC, la radio officielle à Goma. “Personnellement, je n’ai aucune idée de ce que la CPI fait au Kivu,” a-t-il ajouté.
Albert Kambale, journaliste à Goma, a déclaré que la ICC devait intensifier ses activités, “Il pourrait être préférable d’organiser des activités entre trois et quatre fois par mois... ils doivent nous informer pour que nous puissions informer les autres.”
Juvenal Munubo, un avocat de Goma, pense qu’au-delà de l’engagement auprès des journalistes pour disséminer l’information, davantage doit être fait pour informer la communauté juridique, et que le manque de communication de la CPI ternit son image, “La CPI tient des réunions de 30 à 60 minutes dans des hôtels de luxe, [mais] à quelles fins?“
“Vous ne pouvez pas comprendre la CPI en 30 minutes, même si vous êtes juriste. Il faut au moins deux semaines. Mais apparement, la préoccupation de la CPI est ailleurs [qu’à Goma].”
Perdomo a expliqué que son équipe cherche le meilleur moyen d’informer les Kivus sur ce qui se passe à la CPI, mais jusqu’à ce qu’un mandat d’arrêt soit émis à partir de l’enquête sur les Kivus, son équipe se doit de concentrer ses efforts sur l’Ituri.
Mais les ONG internationales disent que la Cour devrait commencer à informer dans une zone dès qu’elle décide d’y enquêter.
"Sinon vous arrivez au stade du procès et les gens ne savent rien sur la CPI, et il est difficile d’y retourner et de créer une conscience éclairée," explique Alison Smith de l’ONG No Peace Without Justice.
INSECURITÉ
La CPI a cité l’insécurité continue comme une raison de son absence sur le terrain aux Kivus, mais Smith explique que le fait de ne pas être présente est le plus grand défaut de la CPI. “Vous devez être là. Les gens veulent savoir mais si vous n’y allez pas, il n’y a aucune possibilité qu’ils sachent," a-t-elle dit.
Perdomo explique que par rapport à la sécurité, son équipe suit les conseils de la mission des Nations Unies en RDC et que “lorsque il y aura une fenêtre d’opportunité parce que les conditions sécuritaires nous le permettentront, nous irons”.
Elle a insisté sur le fait que les questions de sécurité ont un impact sur les gens qu’elle embauche et que les coordinateurs de terrain doivent être internationaux pour qu’ils puissent être retirés du pays s’il y a un problème. “Avec une personne locale nous ne pouvons pas – leurs familles sont toujours là-bas. Ils peuvent être confronté à des actes de vengeance de la part des ennemis de la Cour. Nous opérons dans des conflits en cours,” a-t-elle dit.
Perdomo insiste sur le fait que la Cour ne peut pas mettre les gens en danger, “C’est quelque chose que nous ne ferons pas. Ce n’est pas un jeu.”
Cependant, Chidi Anselm Odinkalu de l’Open Society Institute a expliqué, “Si la CPI cite la sécurité comme une excuse pour ne pas faire de sensibilisation là où c’est nécessaire, nous ne pouvons nous empêcher de penser pour les victimes qui vivent dans ces endroits que le personnel de la CPI a peur d’y aller. Que va-t-il leur arriver?”
La Cour est déterminée à diffuser les audiences d’ouverture et de clôture de chaque procès en RDC mais l’envoi du signal satellitaire à RTNC coûte cher, et la diffusion du début et de la fin de tous les procès en cours rajoute jusqu’à 90 000 euros.
Cela prend une grosse part du total de 650 000 euros, mais Perdomo dit qu’envoyer des images télévisées en direct est nécessaire.
GRAND ÉCRAN
Pour s’assurer qu’autant de personnes que possible puissent voir le premier jour du procès Lubanga en janvier, la CPI avait installé un grand écran dans le centre ville de Bunia, la capitale de la région de l’Ituri. Mais beaucoup plus de gens que prévu avaient essayé de s’entasser à la projection, et celle-ci avait finalement du être annulée.
Pour empirer les choses, le RTNC avait interrompu la transmission juste avant les déclarations liminaires de la défense, déclenchant une tempête de protestation parmi les supporters de Lubanga. "Si vous ne contrôlez pas ce qui est diffusé vous ne pouvez pas contrôler le message. Cela signifie que la CPI n’est pas complètement en charge du message qu’elle veut faire passer auprès des gens en RDC," a déclaré Smith.
Elle a également rejeté les affirmations selon lesquelles un manque d’argent serait la raison de la faiblesse de l’information.
"Un vrai programme solide de sensibilisation a besoin d’un soutien financier adapté. Mais en attendant, il existe des manières moins chères de le faire. Tout ce dont vous avez besoin c’est de quelqu’un sur le terrain avec un portable, une connection internet, et quelques documents, et vous pouvez faire de la sensibilisation efficace. Mais vous avez besoin de suffisament de gens sur le terrain pour faire de la sensibilisation de cette manière," a déclaré Smith.
Perdomo explique qu’il ne s’agit cependant pas d’appeler par téléphone pour relater une histoire, “il s’agit de réunir les gens pour avoir un dialogue, et vous devez payer le transport, les repas et l’hébergement.”
Chaque activité de sensibilisation en RDC coûte environ 750-800 dollars, y compris la location d’une salle, la location de l’équipement, et le paiement pour le transport, l’hébergement et les repas des participants.
La CPI paye aussi les stations de radio des communautés locales pour diffuser ses mises à jour audio au sujet des procédures à la Cour. “Nous les payons pour diffuser nos documents, parce que nous savons qu’ils doivent vivre de quelque chose,” a déclaré Perdomo.
“Vous essayez d’être aussi créatif que possible, et d’affecter les fonds dont vous disposez de telle manière que vous puissiez avoir un impact dans ce que vous faites.”
“MAUVAISE CIBLE”
Mais les journalistes congolais sont critiques par rapport à un aspect de ce raisonnement créatif, et certains disent que les activités de sensibilisation se concentrent sur les mauvaises personnes dans les mauvaises régions.
Un évènement intitulé ‘Non à l’utilisation des enfants soldats’, avait été organisé en mai à Kinshasa. Les enfants récitaient des poésies et s’adonnaient au ballet, et des acteurs et des chanteurs furent mis à contribution pour améliorer l’image de l’évènement.
Thomas d’Aquin Moustapha, du Nord Kivu, a indiqué que Kinshasa n’état pas le bon endroit pour un tel évènement., “[Il] devrait être organisé directement dans les provinces affectées par le conflit armé et où le recrutement des enfants soldats est une réalité.”
Perdomo a expliqué que la CPI avait voulu tenir un évènement à Bunia, mais que cela n’avait pas été possible en raison de problèmes internes dans les écoles. Elle a souligné qu’i était important d’accroître la sensibilité à Kinshasa, là où la direction politique du pays est déterminée.
Les gens aux Kivus disent que l’absence d’activités sur le terrain cause une perte de confiance des victimes en la Cour.
Evariste Mabruki, président d’une ONG de Goma, a déclaré que “n’ayant pas de bureau de terrain vers lequel se tourner au Nord Kivu et manquant d’informations sur la CPI, les victimes ne savent plus và qui s’adresser”, et l’ignorance au sujet de la CPI a conduit à un manque d’intérêt chez les victimes.
Odinkalu a expliqué que pour que la CPI soit crédible, elle a besoin que les victimes et les communautés hôtes lui fassent confiance et la prennent au sérieux, “En ce qui concerne la situation et les endroits que je connais, ce n’est pas le cas en ce moment.”
DÉBUTS
Mariana Pena du groupe de défense des droits de l’Homme FIDH est déçue que la sensibilisation n’ait pas commencé plus tôt en RCA, “Cela fait maintenant deux ans et une personne a été arrêtée, mais le nombre d’activités est extrèmement faible.“
“C’est une question clé en RCA et c’était aussi un problème en RDC. Si vous ne commencez pas très tôt avec la sensibilisation, les incompréhensions commençent à circuler et il est difficile de contrer ces perceptions plus tard.”
En mars, Marie-Edith Douzima, une avocate centrafricaine représentant les victimes dans le procès Bemba, avait dit à l’IWPR que les Centrafricains étaient de plus en plus impatients, “L’année dernière nous avons travaillé avec la CPI pour définir des stratégies visant à informer les gens dans notre pays. Mais ils sont rentrés à La Haye et nous n’avons vu aucun résultat.”
Lucile Mazangue, membre de l’association des femmes avocates en RCA, a expliqué que quand le bureau de la CPI avait été établi ils avaient organisé des séminaires et diffusé des documents à la radio, mais qu’ils avaient arrêté après un certain temps.
“[Rapidement] nous avons remarqué que la CPI ne faisait rien. Alors l’association a demandé pourquoi la CPI ne s’engageait pas à nos côtés pour que nous puissions expliquer aux gens,” a-t-elle dit.
Pena explique que cela cause des déceptions et des frustrations, Quand quelqu’un de la Cour vient, il y a des sessions de planning mais pas de suivi. Les gens ne veulent alors pas entendre parler de la CPI parce qu’ils ne croient plus rien à son sujet.”
Marcel Nboula, du quotidien Le Citoyen, a déclaré à l’IWPR en mars, “Nous n’avons jamais reçu d’informations sur ce qui se passe à la Cour. Nous cherchons sur internet et republions les [articles] mais nous n’obtenons pas d’informations de la CPI. Autrefois, nous avions des informations de Goungaye Wanfiyo [un avocat de RCA tué dans un accident de voiture en décembre] jusqu’à ce qu’il meurre.”
Depuis que ces entretiens ont été menés, des sources à Bangui disent que les activités de sensibilisation ont été renforcées, y compris des ateliers pour accroître la sensibilisation dans toute la ville et dans les provinces environnantes, au cours desquels des vidéos sont montrées et des sessions de questions-réponses organisées au sujet de la Cour.
Deux sessions de formation ont été tenues pour 72 journalistes à Bangui, et en juillet, la Cour va commencer à diffuser une émission de radio appelée ‘Demandez à la Cour’.
Les émissions sont en Sango, la langue nationale, et répondent aux questions les plus fréquentes. Chacun des 13 épisodes sera diffusé trois fois sur sept stations de radio différentes dans la capitale.
Le pays n’a pas de station de radio nationale et pratiquement aucun média en dehors de Bangui, ce qui signifie que les Centrafricains en dehors de la capitale sont largement coupés de l’information.
“Nous avons plaidé pour que la Cour donne des informations à Bangui pour que les [détails au sujet de la Cour] soient connus,” a déclaré l’avocat Celestin N’Zala. “Mais les gens dans les provinces ne savent rien sur la CPI. Beaucoup doit être fait. Les doivent gens doivent être sensibilisés pour qu’ils sachent.”
VIOLENCE KÉNYANE
Les journalistes kenyans comme le documentariste Maina Kiai ont dit que pendant que la CPI envisage d’ouvrir une enquête sur les violences post-électorales de décembre 2007, elle devrait s’engager et informer les gens sur la question de savoir si cela entre dans le mandat de la CPI, et quels facteurs influencent son processus de décision.
"Dans une situation où les Kenyans attendent en retenant leur souffle, cela n’empêcherait pas la CPI de continuer à nous informer et répondre à nos questions," a déclaré Maina Kiai.
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Alors que le Bureau du Procureur a aidé à organiser des entretiens, Kai a déclaré qu’il n’en était pas de même pour d’autres organes de la Cour, "Cela aiderait si la CPI se rendait compte comme il est difficile d’atteindre La Haye depuis l’Afrique."
Le juge Richard Goldstone, ancien Procureur en chef des Tribunaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie, a déclaré que les médias étaient “le moyen le plus efficace pour expliquer ce qui se passe à la Cour, et contrer toute rumeur négative ou tout malentendu. Si la Cour ne fait pas cela, alors elle perdra un allié essentiel".
Silvana Arbia, Greffe de la CPI, reconnaît que “le rôle des journalistes est très important pour la justice”, mais a souligné qu’atteindre les journalistes n’était pas toujours facile.
“Dans les villages nous avons des journalistes qui ne savent pas comment obtenir des informations. Nous esssayons d’atteindre chaque journaliste qui est interessé, et aussi de sensibiliser les autres journalistes et nous les poussons à s’intéresser à la CPI,” a-t-elle dit.
En soutien de cela, 27 clubs d’écoute ont été mis en place dans des villages autour de l’Ituri, et ont reçu des sets de radio et des mini enregistreurs pour permettre aux communautés d’écouter les nouvelles sur la Cour, et de renvoyer leurs questions enregistrées.
Perdomo espère répandre l’idée dans les Kivus, “Nous leur donnons des cartes de téléphone et l’équipement pour installer le club. Cela nous aide à couvrir les zones qui ne sont pas facilement accessibles sur le terrain.”
Mais Enack Makunda, coordinateur d’une ONG à Goma, a déclaré que la communication avec les gens au moyen de la radio n’était pas suffisante, “De nombreuses personnes vont entendre le message, mais ne seront pas convaincues. Il n’y a pas d’interaction. Les gens ne peuvent pas discuter avec la radio sur l’émission qu’elle diffuse.“
“C’est pourquoi il est bon de développer des activités de base qui peuvent permettre aux communautés de discuter de plusieurs questions ayant été abordées dans l’émission.”
Perdomo a reconnu que ce n’est pas la même chose que de s’adresser aux gens dans un face-à-face, “Nous devons aborder les gens non pas une fois que nous sommes partis, mais rencontrer le même groupe plusieurs fois et les tenir informés des évolutions, et leur dire que c’est important pour la Cour.”
RÔLE DES ONG
Outre le fait d’accroître son travail auprès des journalistes, les ONG appellent la CPI à s’engager à leurs côtés de manière plus active, parce qu’ils peuvent atteindre des parties du pays que la Cour ne peut pas.
“Le Bureau de la CPI [en RCA] devrait être renforcé pour qu’une campagne de sensibilisation plus importante puisse être menée, pour que les gens simples dans la rue puissent dire quelque chose sur la CPI. La CPI devrait travailler avec les ONG locales. Si nous travaillons en collaboration nous pouvons informer les gens sur la CPI,” a dit Mazangue.
Smith a expliqué que l’équipe de sensibilisation au Tribunal spécial pour la Sierra-Leone travaillait avec les ONG, qui savent comment atteindre les gens et surmonter les barrières culturelles et linguistiques, “Il y a certains messages qui sont venus de la Cour, mais la société civile a joué un rôle crucial pour faire passer le message."
Arbia reconnaît que les ONG locales jouent un rôle crucial en aidant la Cour à atteindre les gens, “Nous sommes très reconnaissants pour ça. Sans la contribution des ONG dans cette situation difficile, il ne serait pas possible pour nous d’agir comme nous le faisons.”
Interrogé sur la question de savoir si les 109 États qui soutiennent la Cour et la financent, réunis dans l’Assemblée des États parties, AEP, devraient assigner plus de moyens aux activités de sensibilisation, Arbia a indiqué qu’il y a d’autres facteurs qui limitent la capacité de la Cour à atteindre toutes les communautés affectées, et a appelé les 109 États à également jouer un rôle.
“Même si nous obtenons plus d’argent, la Cour seule ne pourra jamais faire tout ce qui est nécessaire. Ce n’est pas possible pour nous – le nombre d’employés sera toujours limité. Parfois nous échouons parce que nous ne recevons pas de soutien. Parfois nous ne pouvons pas aller dans un village parce que nous n’avons pas de sécurité en raison d’un manque de coopération de l’État,” a-t-elle dit.
Les ONG, journalistes, avocats et victimes sont frustrées en raison du manque d’informations au sujet de la CPI parce qu’ils croient en la Cour et sont impatients de voir la justice dans leurs pays.
Atteindre les gens affectés par la guerre est un défi. Parlant de la détention de Bemba, une femme à Bangui a déclaré, “Je ne sait pas où est Bemba. Il doit être dans son pays. Nous avons entendu parler de la CPI mais n’avons pas fait d’efforts pour en apprendre davantage. Nous avons des mauvais souvenirs de Bemba alors nous ne voulons pas savoir.”
Elle a indiqué qu’elle ne pouvait pas lire les journaux et qu’elle n’avait pas accès à une radio et qu’elle aurait donc des difficultés à entendre parler de la Cour même si elle le voulait. Elle a cependant souligné qu’elle espère que l’engagement de la Cour en RCA va faire “cesser les viols, si les auteurs savent qu’ils pourraient être poursuivis en justice”.
Mathurin Constant Nestor Momet, du quotidien Le Confident à Bangui, a déclaré, “La CPI est rassurante, parce qu’elle est juste au coeur, pas du côté du gouvernement ou des gens.”
Les chefs d’ONG au Nord Kivu espèrent que la CPI s’adressera bientôt à eux, ou les spéculations sur ce que fait la Cour, et les déceptions sur ce qu’elle ne semble pas faire, vont monter en spirale.
Ils sont impatients que la CPI fasse clairement passer son message dans les Kivus, convaincus que cela pourrait aider à dissuader un comportement violent de la part des autorités et des chefs de milice.
“Les autorités protègent les auteurs cr crimes, affirmant qu’ils ont besoin de paix d’abord et de justice ensuite, mais il n’y a pas de paix sans justice. Les gens veulent voir la CPI sensibiliser ces autorités aussi,” a expliqué Moustapha.
Reportages de Jacques Kahorha à Goma et Katy Glassborow à Bangui. Avec des reportages aditionnels de Patrick Tshamala et Taylor Toeka Kakala en RDC, et Ewing Ahmed Salumu à La Haye.