Un procès important renforce la confiance dans la justice congolaise

La condamnation pour meurtre du fils d’une personnalité politique de haut rang a rétabli une certaine confiance dans un système de justice sujet à la corruption et à l’ingérence politique.

Un procès important renforce la confiance dans la justice congolaise

La condamnation pour meurtre du fils d’une personnalité politique de haut rang a rétabli une certaine confiance dans un système de justice sujet à la corruption et à l’ingérence politique.

J’ai enfin pu écrire l’article que je souhaitais écrire depuis longtemps: que le Congo peut s’en sortir s’il le veut. C’est juste une question de volonté. Pour la première fois, j’ai eu l’espoir qu’avec de la bonne volonté, justice peut être faite. J’étais fier d’être Congolais.

Tout s’est passé suite au meurtre par arme à feu en janvier dernier de Tony Grigorakis, unhomme d’affaire réputé de Lubumbashi, dans l’est de la République démocratique du Congo, RDC. Ali Mohammed, le meurtrier présumé, avait été arrêté et emmené au tribunal militaire de la ville. J’ai été surpris d’apprendre que le procès aurait lieu le jour suivant.

L’élément inhabituel de ce procès tenait à la personne présente dans le box des accusés. Mohammed est le fils de Thérèse Maloba Ngoy, directrice provinciale de l’institut national de sécurité sociale. Les gens riches sont rarement poursuivis ici. Les juges trouvent toujours une raison de les laisser partir. 

Le procès a provoqué un intérêt sans précédent. Comme Mohammed est originaire d’une famille très importante, de nombreuses personnes pensaient qu’il serait hors de portée de la loi. 

Les audiences étaient ouvertes au public et diffusées en direct sur les stations de radio et de télévision de Lubumbashi, déclenchant un vaste intérêt dans toute la ville.

Généralement les procès ont lieu derrière des portes closes et les journalistes n’ont pas le droit d’en parler. Mais cette fois-ci l’affaire s’est déroulée aux yeux du public. De mes 12 années d’expérience comme journaliste à Lubumbashi je n’avais jamais vu ça. C’était une justice efficace et transparente. Ce n’était pas comme ça que les choses étaient faites en général dans l’est de la RDC.

A mesure que le procès évoluait, nous avons appris que Grigorakis, personnage important d’une compagnie minière qui opère dans la ville voisine de Kolwezi, avait été tué par balle par Mohammed après une nuit passée en discothèque. Les deux hommes s’étaient apparemment disputés au sujet du partage des profits de la vente de minerai extraits par la compagnie de Grigorakis.

Le public était venu en masse trouver une place dans la salle d’audience. Chaque matin à 7h, la salle était pleine. Les gens ne voulaient pas rater une minute du procès. Ils restaient bien après minuit chaque soir. Ceux qui n’arrivaient pas à se frayer un chemin à l’intérieur attendaient dehors. Chacun voulait voir si justice serait faite.

C’était quelque chose de très rare. Je n’avais jamais vu un tel intérêt du public dans une affaire judiciaire à Lubumbashi. C’était aussi la première fois qu’un procès était retransmis en direct à la télévision.

Pour écrire un article sur le procès j’ai suivi tous les développements de très près, afin d’avoir des informations précises. J’arrivais dans la salle d’audience très tôt chaque matin pour m’assurer de trouver une place.

Au départ, le procès devait durer 3 jours, une semaine au plus. Cependant à la surprise de tous, il a duré tout un mois.

Grâce aux dépositions des témoins, j’ai pu me faire une idée précise des évènements du 4 janvier. Les balles utilisées pour tuer la victime ont été présentées à la cour.

Les juges ont voulu étudier toutes les preuves disponibles, en particulier les rapports des experts militaires et balistiques. Ces derniers ont considérablement rallongé le procès car les juges ont eu besoin du témoignage de plusieurs experts militaires.

J’ai eu l’impression que le procès avait été pris au sérieux par les responsables politiques locaux. Le gouverneur de la province du Katanga, Moise Katumbi, et le gouvernement provincial ont suivi la procédure. Deux ou trois ministres étaient présents dans la salle chaque jour.

En tant que reporter, spectateur et citoyen congolais, j’ai été surpris de voir les juges faire leur travail correctement. 

Mohammed a été reconnu coupable de meurtre et condamné à mort – mais, étant donné le moratoire actuel sur les exécutions dans le pays, il est peu probable qu’il soit exécuté.

Néanmoins, le procès a montré que s’il y a une volonté politique, le système de justice congolais peut bien faire son travail et justice peut être faite.

Ma contribution a été d’informer le public sur ce qui se passait dans la salle d’audience et de montrer aux gens que, pour la toute première fois, ils peuvent avoir confiance dans notre système judiciaire.

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