Le nouveau juge du procès Lubanga tient au procès en RDC

Il insiste sur le fait que la conduite d’une partie de la procédure en RDC permettrait de rendre la justice pertinente pour les Congolais.

Le nouveau juge du procès Lubanga tient au procès en RDC

Il insiste sur le fait que la conduite d’une partie de la procédure en RDC permettrait de rendre la justice pertinente pour les Congolais.

Monday, 6 August, 2007
Le nouveau juge dans le procès pour crimes de guerre de Thomas Lubanga souhaiterait conduire une partie de la procédure en République démocratique du Congo, RDC, pour qu’il soit plus pertinent pour les gens affectés par les crimes.



La CPI est basée à La Haye, aux Pays-Bas, mais le juge Adrian Fulford a déclaré à l’IWPR, « Je pense que, dans la mesure du possible, nous devrions nous assurer que les procès menés à la CPI sont pertinents pour les pays d’où ils émergent. »



En tant qu’ancien chef de l’Union des Patriotes Congolais, UPC, une milice tribale Hema, Lubanga a été inculpé par la CPI pour avoir prétendument enrôlé et conscrit des enfants qu’il aurait utilisés pour se battre dans des combats interethniques sanglants dans la région de l’Ituri, en RDC.



Il a été transféré de Kinshasa à La Haye en mars 2006, et les juges ont décidé que les preuves étaient suffisantes pour renvoyer l’affaire en jugement.



Le juge Fulford, qui a été élu le 12 juillet comme juge président, a déclaré à l’IWPR, « [Il y aurait un] bien plus grand degré de pertinence si le procès retournait dans le pays où les évènements critiques ont eu lieu, où il pourrait être directement suivi par les premiers intéressés et devenir une part intégrante de la vie du pays ».



La CPI est le premier tribunal permanent sur les crimes de guerre et n’importe quel pays peut choisir d’y participer, et demander de l’aide pour les enquêtes et les poursuites visant des suspects de crimes de guerre.



Le gouvernement de la RDC a renvoyé la situation à la CPI en avril 2004, et le juge Fulford est conscient du fait que la sécurité reste un problème en raison des tensions interethniques persistantes.



Cependant, il insiste sur le fait que transférer une partie du procès à domicile permettrait de rendre la justice plus pertinente pour les Congolais, et de « mettre un terme à cette distance et à ce déplacement des procédures vers l’Europe du Nord ».



En tenant compte des leçons des Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie, la CPI tient à impliquer les victimes autant que faire ce peut, de manière à ce que les verdicts aient un impact durable sur les pays impliqués.



Mais la Cour essaye également de travailler aussi vite que possible, et malgré le feu vert donné par les juges de la Chambre préliminaire pour que l’affaire Lubanga soit renvoyée en jugement, le juge Fulford a indiqué que celui-ci ne commencerait pas avant la fin de l’année au plus tôt.



La procédure est bloquée en raison de problèmes de sécurité en Ituri. En plus de cela, la démission de l’avocat de Lubanga, Jean Flamme a conduit à une période de négociation entre la Cour et son nouveau Conseil désigné, Catherine Mabille au sujet des ressources allouées à la défense.



Jamais avant un tribunal international n’a donné aux victimes l’opportunité de participer à la fois aux enquêtes sur des crimes de guerre et au procès des suspects.



Le juge Fulford est conscient que l’étendue de la participation des victimes pourrait bien avoir un impact sur la longueur du procès. Des questions subsistent en outre sur ce que comprend exactement la participation.



D’après le règlement de la Cour, les victimes peuvent faire une demande de participation « lorsque [leurs] intérêts personnels […] sont concernés ». Elles doivent démontrer qu’elles ont souffert des crimes pour lesquels l’accusé est poursuivi.



« Cela ne va pas nécessairement conduire à une bataille à trois », a déclaré le juge Fulford, parce que selon les règles de la Cour, toute participation des victimes ne doit pas rendre le procès inéquitable pour le défendeur.



Quelle devra être l’ampleur de la participation des victimes pour qu’elle ait un impact sur la longueur du procès dépendra de ce qu’elles sont autorisées à faire, et le juge Fulford a affirmé qu’il est « extrêmement intéressé par l’importance que l’on peut accorder à un vrai rôle des victimes, tout en protégeant les droits de l’accusé à un procès équitable ».



Dans la mesure où les victimes peuvent potentiellement poser des questions à l’accusé devant la Cour, le juge Fulford a concédé qu’il existe une source de tension potentielle entre les rôles de l’Accusation, de la défense et des victimes, que les juges « doivent bien garder à l’œil ».



Certains groupes de défense des droits de l’homme ont critiqué la CPI pour avoir seulement accusé Lubanga de conscription d’enfant soldats, alors qu’ils affirment qu’il est responsable de pléthore d’autres crimes résultant d’une lutte interethnique pour l’accès à l’or, aux diamants et au bois depuis la fin des années 1980.



Des groupes de pression ont fait campagne pour que les charges soient étendues pour inclure les crimes de violence sexuelle. Ils affirment que lors de leurs interrogatoires, d’anciennes filles soldats mentionnent des expériences incluant le viol, mais ces charges ne sont pas insérées dans l’acte d’accusation.



Le juge Fulford a déclaré que les procès pénaux tendent à être « organiques dans la manière dont ils se déroulent », et la question de savoir s’il y aura une occasion ultérieure d’amender les charges au cours du procès sera décidée par la jurisprudence – ou par des précédents – de la Cour. La Cour a une liberté considérable pour décider de la manière dont va se développer le procès.



« Nous ne commençons pas avec une feuille de papier vide, mais une avec feuille qui a une capacité limitée de remplissage, » a déclaré le juge Fulford.



Il est également désireux d’explorer des méthodes différentes pour recueillir les témoignages des endroits où la Cour agi.



Un juge unique pourrait, par exemple, entendre les dépositions d’un témoin en présence d’avocats de l’Accusation, de la défense et des victimes, les résultats étant incorporés au procès.



« Nous avons besoin d’étudier les moyens les plus appropriés pour recueillir les preuves au sein d’un tribunal international, » a-t-il confié.



Il existe une forte supposition que les procédures vont être contradictoires autant que les avocats de l’accusation, de la défense et des victimes présenteront des arguments contradictoires aux juges, mais le juge Fulford a déclaré que cela ne devrait pas être considéré comme acquis.



« Nous avons suffisamment de flexibilité, et devons être réceptifs aux problèmes particuliers qui surviennent avec les témoins individuels », a déclaré le juge.



Si la Cour avait une procédure permettant que les dépositions de témoins soient enregistrées en RDC ou dans tout autre pays à situation de la CPI, sous la supervision de juges, « nous prendrions alors un rôle proactif dans le traitement des témoins », a-t-il dit.



Les juges ont reconnu que le contre interrogatoire de témoins devant la Cour, qui pourrait être un outil utile pour déterminer la vérité, peut ne pas être le processus le plus agréable pour des témoins psychologiquement abîmés ou fragiles, « Nous devons nous assurer que nous mettons en place pour nous-mêmes les meilleurs moyens de conduire ces procès, et nous n’écartons pas les autres possibilités et gardons les yeux grand ouverts par rapport aux autres solutions. »



Une audience préliminaire aura lieu le 4 septembre afin de déterminer un calendrier pour traiter des questions préliminaires.



Katy Glassborow est reporter de l’IWPR à La Haye.

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