Viol de bébés congolais dans des rituels de magie noire

La superstition serait à la source de cas perturbants de violences sexuelles commises contre des enfants.

Viol de bébés congolais dans des rituels de magie noire

La superstition serait à la source de cas perturbants de violences sexuelles commises contre des enfants.

A women's shelter for victims of sexual abuse in eastern DRC. (Photo: UN Photo/Marie Frechon)
A women's shelter for victims of sexual abuse in eastern DRC. (Photo: UN Photo/Marie Frechon)
Tuesday, 27 July, 2010
Six enfants de moins de deux ans auraient été violés ou sexuellement agressés dans la zone de Lubumbashi, dans le cadre de rituels commis par des hommes qui pensent que ces actes vont leur porter bonheur. Les nouveaux cas de violences sexuelles faites à des enfants interviennent à la suite d’un nombre de crimes semblables commis au cours de l’année passée. Ceux-ci avaient déjà fait beaucoup de bruit, alarmant les activistes et provoquant des appels à l’introduction de la peine de morts pour de tels crimes. A Lubumbashi, une nouvelle unité de police – mise en place il y a quatre mois – chargée de protéger les femmes des violences sexuelles, avait parlé à l’IWPR des derniers cas, qui, selon elle, concernaient des bébés. L’unité a déclaré qu’elle était au courant d’autres cas similaires dans d’autres endroits du pays. Maurice Mulamba, un officier de presse au sein de l’organisation de protection de l’enfant, PCPDE, une ONG qui travaille en coopération avec l’UNICEF, l’agence des Nations Unies pour la protection de l’enfance, a parlé d’incidents "déplorables". "Les cas de violences sexuelles ont pris une tournure inquiétante à Lubumbashi," a-t-il dit. "On ne peut pas nier ce qui arrive." Les rapports faisant état d’abus commis sur des enfants ont provoqué la consternation des groupes de défense des droits des femmes pour qui les auteurs devraient être punis de la peine de mort. En droit congolais, la sanction pour abus sexuel d’un enfant de moins de 17 ans est une peine de prison comprise entre 7 et 20 ans. Mulamba a déclaré que, récemment, un père avait été reconnu coupable d’avoir violé sa fille âgée de huit mois, cette affaire étant l’une des six à avoir été traitée par la nouvelle unité de police. Il s’était enfui après avoir commis ce crime, mais avait été arrêté deux semaines plus tard, un ami qui savait où il se cachait l’ayant dénoncé à la police. Il avait ensuite été condamné à la peine de prison maximale de 20 ans. Mulamba a déclaré que la superstition était l’une des raisons clefs expliquant les nouveaux crimes rapportés, les auteurs croyant apparemment que les relations sexuelles avec des enfants pouvaient leur apporter richesse et bonheur. C’est aussi l’avis de Chantal Manda, la mère d’un enfant de dix mois qui avait été violé par son mari en avril 2009, un incident largement relaté par les stations de radio et de télévision à l’époque. Plus d’un an après, Manda avait relaté cette histoire à l’IWPR. "Mon mari était mineur," raconte-t-elle. "Un soir, il est rentré à la maison en disant qu’il savait comment nous pourrions devenir riches comme nos amis. Il a dit qu’il faudrait que je le laisse coucher avec notre fille. Il a dit qu’il apporterait le sang au devin après l’acte sexuel et que nous aurions beaucoup d’argent." Manda affirme qu’elle s’est opposée à la proposition de son mari. Mais elle soutient qu’il a violé leur fille alors qu’elle avait quitté la maison le matin suivant pour aller au marché. "Je n’ai pas traîné au marché," raconte-t-elle. "Lorsque je suis revenue, j’ai trouvé mon enfant qui pleurait et mon mari qui la portait. J’ai vérifié sa couche et j’ai vu que l’enfant saignait". "J’ai alerté ma mère qui m’a conseillé d’aller voir un médecin. A ma grande surprise, le médecin nous a dit que le bébé avait été violé. Je suis allée voir la police et mon mari a été arrêté. Il purge aujourd’hui sa peine à la prison de Kasapa." Après son arrestation, le père, Augustin Ndambwe, avait parlé à la presse et avoué son crime. " J’ai côtoyé un devin qui m’a dit que si je dévierge ma fille et que je lui apporte le sang, il fera la magie et j’aurais beaucoup d’argent. C’est la misère qui m’a poussé à agir de la sorte", avait-il expliqué. Gisèle Ngungwa, une avocate de Lubumbashi, avait confirmé que l’explication donnée par Ndambwe était courante dans les cas de viol de bébés. "J’ai assisté à environ une douzaine de procès de ce genre, et les auteurs disaient toujours qu’ils avaient violé leurs enfants sur les conseils des devins (sorciers), qui disaient que le sang des bébés leur apporterait chance et bonheur," a-t-elle dit. "Nous devons travailler ensemble afin de mener une étude au sujet des peines adaptées aux cas de violence sexuelle." "Comment pouvons-nous expliquer qu’un adulte puisse violer un enfant de moins de deux ans?" avait demandé Béatrice Kaind, une activiste de la société civile. "C’est diabolique, je pense qu’une peine de 20 ans n’est pas suffisante... Je propose la pendaison. On dira que je suis extrémiste, mais je ne vois pas une peine qui concorde à l’acte. Je pense que les auteurs de ces crimes devraient être pendus publiquement." Certains ont suggéré que les sorciers qui encouragent le viol des bébés devraient être jugés aux côtés des auteurs des viols, mais maître Jérôme Itongo a déclaré que cela ne pouvait pas se produire sous le système juridique actuel. "Le fétichisme (sorcellerie) n’est pas reconnu en droit congolais," a-t-il expliqué. "Il sera difficile à prouver, dans le cadre de la loi, que les fétichistes poussent les auteurs à commettre ces crimes. Ce qui compte pour le juge c’est l’acte de violence sexuelle". "Pour commettre ce crime l’auteur a réfléchi et a délibéré ; c’est lui qui est coupable parce que c’est lui a commis le forfait." Beaucoup craignent que, malgré le fait que de nombreux cas soient connus, un grand nombre d’autres ne font l’objet d’aucun rapport. Certains pensent que de telles violations se sont produites depuis un certain temps mais qu’elles n’émergent que maintenant parce que les autorités accroissent désormais leurs efforts pour protéger les femmes des violences sexuelles. "Ce fait n’est pas nouveau, ce qui veut dire que cela se faisait depuis longtemps. Actuellement c’est connu parce que c’est médiatisé", a expliqué une femme vivant à Lubumbashi, qui ne voulait pas que son nom soit révélé. Il y a certainement d’autres cas qui ne sont pas connus et qui ne seront peut-être jamais connus du grand public."Héritier Maila is an IWPR-trained journalist.
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