Un témoin déclare que Lubanga était à la tête de l'UPC
Par Wairagala Wakabi (AR No. 211, 8-May-09)
Un témoin déclare que Lubanga était à la tête de l'UPC
Par Wairagala Wakabi (AR No. 211, 8-May-09)
Lubanga avait commencé par vendre des haricots sur un marché de Bunia, en Ituri, dans l’est de la République démocratique du Congo, selon le premier témoin à comparaître suite à une interruption de trois semaines dans le procès.
Lubanga était passé de son statut de vendeur au marché à celui de porte-parole de la milice de l’ethnie hema, puis de chef de l’UPC.
L’Accusation a aussi présenté à la Cour plus de 80 documents qui montrent selon elle l’autorité globale qu’exerçait Lubanga au sein de l’UPC.
Certains des documents sont liés à la structure organisationnelle et furent apparemment rédigés alors que le groupe contrôlait Bunia et d’autres parties de l’Ituri en 2002 et au début de l’année 2003.
Selon le Procureur Manoj Sachdeva, les documents comprenaient différentes lettres adressées à, “Son excellence le Président de l’UPC, Thomas Lubanga,” au côté d’autres rédigés par Lubanga dans cette capacité.
Dans l’un des documents, Lubanga informait apparemment quelqu’un au sujet d’un emploi au sein de l’UPC, ce qui montre qu’il existait “une structure et une organisation efficaces” dans le groupe, avec des mécanismes pour procéder à des nominations et promotions, comme l’a expliqué Sachdeva.
Les documents comprenaient une lettre de Bosco Ntaganda, l’ancien Chef d’État major adjoint au sein de la milice de l’UPC, qui a été inculpé par la CPI pour des chefs d’accusation similaires à ceux portés contre Lubanga, mais est toujours en liberté en RDC.
L’Accusation a indiqué que la lettre montrait que Lubanga avait autorité sur l’UPC et les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), la milice de l’UPC.
Les documents montrent aussi que Lubanga était conscient des activités de la milice dans la zone contrôlée par l’UPC, selon l’Accusation.
Plus tôt dans la semaine, un ancien chef politique d’Ituri non identifié avait indiqué à la Cour que Lubanga était devenu porte-parole des Hema parce qu’il était instruit.
“C’est celui qui pouvait s’exprimer. Les autres n’étaient pas instruits,” a-t-il dit. “Thomas avait même commencé à apprendre l’allemand … il était plus intellectuel que les autres.”
Le Procureur Nicole Samson a demandé au témoin s’il était difficile pour la population d’accepter Lubanga étant donné qu’il n’avait pas d’expérience militaire.
Le témoin a répondu: “Nous n’avions pas de raison de rejeter Lubanga parce que nous étions dans une organisation ethnique et nous avions de besoin de quelqu’un qui pouvait parler au nom de l’organisation.”
Le témoin, resté anonyme, a également expliqué que l’Ouganda avait entraîné des centaines de soldats congolais, y compris des enfants, qui avaient plus tard servi dans la milice de Lubanga.
Il a indiqué que l’Ouganda avait apporté un soutien financier à l’UPC, dont une certaine partie avait été reçue en liquide par Lubanga.
L’armée ougandaise a joué un rôle important dans le renforcement des conflits ethniques de la région, comme l’a indiqué le témoin, qui opposaient les membres de l’ethnie hema de Lubanga aux Lendu.
Le conflit ethnique fut déclenché par une riche famille de Bunia qui avait essayé d’expulser les Lendu de ses terres, a-t-il dit.
Le témoin, qui s’est rappelé avoir vu un village en feu près de Libi dès l’année 1999, a déclaré que la famille Savo avait contacté les forces ougandaises de la région à l’époque. “Le commandant (ougandais) présent donna son autorisation et demanda à ses soldats d’expulser (les Lendu) par la force,” a-t-il expliqué.
“C’est la famille Savo qui est à l’origine du conflit avec le soutien des Ougandais qui ont commencé à brûler des maisons Lendu,” a-t-il dit. “Les Lendu ont fui dans la brousse, mais au bout de six mois ils sont revenus.”
Lorsque les Lendu sont revenus, ils étaient armés et c’est à ce moment-là que le conflit ethnique a escaladé. Répondant aux attaques des Lendu, les Hema ont alors formé des milices armées telles que l’UPC de Lubanga, a expliqué le témoin.
Répondant aux questions de Jean Chrysostome Mulamba, représentant légal des victimes dans le procès, le témoin a indiqué que l’UPC récoltait des taxes sur les marchandises entrant dans la région, récoltant son dû sur les marchés, et qu’elle avait obtenu des contributions de la part de commerçants pour la soutenir dans ses actions politiques et militaires.
De son côté, Serge Kilo Ngabu, un ancien travailleur social dans la région de l’Ituri contrôlée par l’UPC, a relaté que Lubanga menait le groupe et qu’il y avait des centaines d’enfants soldats, certains âgés de moins de neuf ans. Certains d’entre eux étaient des filles, a-t-il dit.
Ngabu a travaillé avec 130 enfants soldats que l’Ouganda avait renvoyés à Bunia du camp d’entraînement militaire de Kyankwanzi en Ouganda. C’était après que l’ONU se soit plainte au sujet de leur entraînement, a-t-il dit.
En tant qu’employé de SOS Grand Lacs, une agence non gouvernementale financée par l’ONU, Ngabu a indiqué qu’il était difficile de convaincre certains parents de reprendre leurs enfants qui étaient revenus de l’entraînement de la milice.
‘J’aimerais retourner chez les soldats parce que chez moi je ne suis pas le bienvenu,” a expliqué Ngabu, comme d’autres enfants.
En résultat, la plupart des enfants qui sont revenus d’Ouganda ont rejoint les militaires après que le groupe de Lubanga ait lutté pour reprendre le contrôle de la région des mains du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD).
En novembre 2002, tous les enfants revenus à l’exception de “sept ou huit” servaient au sein de l’UPC,” a déclaré Ngabu. “Ces enfants étaient recherchés parce qu’ils étaient supporters du groupe hema.”