Nkunda repousse la CPI au sujet d'un inculpé

Le chef rebelle refuse de remettre son adjoint Bosco Ntaganda inculpé par la Cour de crimes de guerre.

Nkunda repousse la CPI au sujet d'un inculpé

Le chef rebelle refuse de remettre son adjoint Bosco Ntaganda inculpé par la Cour de crimes de guerre.

Le général rebelle congolais Laurent Nkunda, chef du Congrès national pour la défense du peuple, CNDP, a déclaré à l’IWPR qu’il ne va pas remettre Bosco Ntaganda, son chef d’État major, inculpé par la Cour pénale internationale, CPI à cette même cour.



“L’extradition d’un Congolais à la Cour pénale internationale est un geste indigne,” a déclaré Nkunda. “Je souhaite que Ntaganda puisse être jugé en Ituri plutôt qu’à La Haye.”



Nkunda a répondu aux questions de l’IWPR depuis une ferme située à Kirolirwe, à près de 60 kilomètres à l’ouest de Goma, un de ses nombreux domiciles dans l’est de la République démocratique du Congo, RDC.



Il n’y a “aucune chance [que je] remettre Bosco Ntaganda à la CPI”, a-t-il dit.



Nkunda a indiqué qu’il n’était pas sûr des crimes précis reprochés à Ntaganda, et a remis en question l’adéquation de l’enquête de la CPI.



“J’exige que la CPI nous donne les preuves de l’implication de [Ntaganda] dans les crimes en Ituri,” a déclaré Nkunda. “J’attends qu’une délégation de la CPI vienne ici dans ce but.”



Nkunda a déclaré qu’avant de coopérer avec la CPI avec son Chef d’État major, il aurait besoin de vérifier l’exactitude des preuves contre Ntaganda.



“Je dois personnellement vérifier [les] preuves en Ituri et non pas à La Haye,” a-t-il dit.



En avril 2008, la CPI avait lancé un mandat d’arrêt international contre Ntaganda pour les crimes qu’il aurait commis entre 2002 et 2003 en Ituri. Quatre autres personnes originaires de la région ont été arrêtées suite à des mandats d’arrêt de la CPI – seul Ntaganda est toujours en liberté.



Malgré les actes d’accusation et une enquête continue de la CPI dans l’est de la RDC, peu de choses ont changé et il semble qu’aucun effort ne soit fait pour arrêter Ntaganda.



Nkunda et son CNDP, une organisation politico-militaire qui contrôle une grande partie du Nord Kivu, ont entre-temps globalement coopéré avec un important accord de paix signé avec les milices en janvier dernier à Goma, la capitale du Nord Kivu.



Certaines unités de l’armée de Nkunda se seraient cependant battues contre les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda, FDLR, une milice rwandaise hutue, qui opère également dans la région.



Ntaganda est actuellement à la tête des troupes de Nkunda, un poste qu’il occupe depuis deux ans. On sait que Ntaganda est dans cette zone, mais Nkunda n’a pas révélé sa localisation exacte.



Nkunda pense qu’il est injuste que son commandant ait été choisi pour faire l’objet de poursuites, alors que de nombreux autres, y compris certains officiels de haut rang au sein du gouvernement, ont également été impliqués dans les atrocités commises dans la région et n’ont pas pour autant été inculpés.



“Ceux qui ont commis les crimes en Ituri sont aujourd’hui au pouvoir,” a-t-il déclaré.



Nkunda a expliqué qu’en 2003, Ntaganda était commandant adjoint de l’Union des Patriotes Congolais, UPC, une milice dirigée par Thomas Lubanga, actuellement en procès à la CPI. A l’époque, Ntaganda recevait ses ordres du Général Floribert Kisembo, l’ancien Chef d’Etat major de Lubanga. Kisemba est maintenant un commandant supérieur de l’armée de RDC dans la province de Maniema.



“Le mandat d’arrêt devrait viser les autorités au sein du gouvernement et de l’armée avant d’impliquer Bosco Ntaganda,” a déclaré Louis Hamuli, un représentant politique de l’organisation de Nkunda. “Les gens doivent savoir que ceux qui ont commis les meurtres en Ituri sont bien [connus]. La plupart d’entre eux ont été nommé [à de] hauts postes.”



Nkunda insiste sur le fait que Ntaganda est un “petit poisson” et prétend que, étant donné qu’il n’est “ni un partenaire du Statut de Rome, ni un membre de la CPI”, il n’a aucune obligation de coopérer.



Mais le porte-parole de la CPI en RDC, Paul Madidi, a déclaré que Nkunda devrait coopérer.



“Si le CNDP pense que Ntaganda n’a commis aucun crime, il doit le remettre à la CPI. Cette cour va donner à Bosco Ntaganda une opportunité de se défendre seul ou avec l’aide d’un avocat qui lui sera assigné,” a déclaré Madidi à l’IWPR.



Selon le Statut de Rome, le gouvernement est obligé de coopérer avec la CPI dans l’arrestation des criminels présumés. Bien que la RDC ait arrêté des suspects de la CPI par le passé, il semble cependant peu probable que cela arrive avec Ntaganda, étant donné qu’il est dans une zone fermement contrôlée par Nkunda.



Les forces des Nations Unies dans la région, MONUC, ont cependant exprimé leur volonté de coopérer.



“La MONUC a dit qu’elle allait aider la CPI avec l’arrestation de Ntaganda, et nous espérons qu’elle va [le] faire,” a déclaré Madidi.



Mais la menace de la participation de l’ONU à l’arrestation n’inquiète pas les responsables au sein du CNDP.



“La MONUC nous a attaqués [aux côtés] des forces gouvernementales [par le passé],” a déclaré un officier du CNDP, qui a préféré ne pas révéler son identité. “Si (la MONUC) ose arrêter [Ntaganda], elle aura [à faire] à nous.”



Jacques Kahorha est un journaliste formé par l’IWPR.
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