L'ARS pourrait abandonner Kony

Les négociateurs de l’ARS semblent perdre patience avec leur chef rebelle quant au processus de paix.

L'ARS pourrait abandonner Kony

Les négociateurs de l’ARS semblent perdre patience avec leur chef rebelle quant au processus de paix.

Friday, 23 November, 2007
Un membre clef de l’équipe chargé des négociations de paix au sein de l’Armée de résistance du seigneur, ARS, a affirmé que le chef de l’armée rebelle allait être abandonné s’il ne parvient pas à signer un accord de paix complet d’ici à février.



Cette attaque d’un membre de l’équipe, le Dr James Obita, est un signe supplémentaire que les pourparlers de paix (initiés à Juba, au sud Soudan il y a près de 18 mois), l’équipe de négociation et l’armée rebelle elle-même pourraient se désintégrer.



« Si Kony refuse de signer un accord de paix d’ici à février 2008, aucun d’entre nous ne le soutiendra. Nous l’abandonnerons dans la brousse et rentrerons chez nous », a déclaré Obita lors du week-end au cours duquel il s’est adressé à des centaines de réfugiés internes dans la ville de Ngai, située au nord du pays.



« Nous allons lui dire d’aller se battre ailleurs, pas en Ouganda du nord, où les gens en ont vraiment assez de la guerre ».



Obita fait partie de l’équipe de négociation de l’ARS qui parcourt l’Ouganda du nord pour consulter des locaux sur les questions de responsabilité et de réconciliation dans le cadre de l’accord de paix entre les rebelles et le gouvernement.



« Ça suffit », poursuit Obito. « Les gens en Acholi, Lango, Teso et West Nile doivent vivre en paix maintenant. Nous nous engageons pour la paix. Ceux qui ne le font pas peuvent aller voir ailleurs ».



Ces commentaires font suite à la défection relatée de 30 soldats rebelles supplémentaires et de leurs commandants, intervenue la semaine dernière au camp de base du parc Garamba au nord-est de la République démocratique du Congo, RDC.



Le ministre d’État ougandais, Henry Okello Oryem a indiqué que les rebelles s’étaient rendus aux Casques bleus des Nations Unies au Congo et qu’ils allaient être remis au gouvernement ougandais.



La défection intervient à peine un mois après que le commandant supérieur de l’ARS, Makasi Opio ait lui aussi quitté les rangs.



C’est également au cours de la semaine dernière que le Conseil de sécurité de l’ONU a fait une déclaration non contraignante en soutient des pourparlers de paix ougandais, mais a aussi insisté sur le fait que Kony doit être traduit en justice. Kony et trois autres commandants ont été inculpés pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale, CPI.



La déclaration du Conseil de sécurité a alimenté les spéculations que cela pourrait faire dérailler les pourparlers de paix étant donné que Kony a juré qu’il ne signerait pas d’accord de paix tant que la CPI n’abandonnerait pas les charges.



La dissension apparente dans les rangs de l’ARS intervient dans le sillage d’un différent relaté entre l’ancien numéro deux dans la chaîne de commandement de l’ARS Vincent Otti et Kony. Bien qu’on ait pas entendu parler d’Otti depuis lors, Kony a indiqué au président du conseil de district de Gulu, Norbert Mao que son deuxième de commandement était en vie, mais assigné à domicile.



Le Chef d’équipe de l’ARS, Martin Ojul, qui a quitté l’équipe de négociation de l’accord de paix le week-end dernier, a insisté sur le fait que ni son équipe ni les pourparlers n’étaient compromis.



« Les défections ne peuvent compromettre les pourparlers de paix », a indiqué Ojul à l’IWPR. « Quoi qu’il se passe au [parc] Garamba, cela n’affectera pas le processus de paix. Joseph [Kony] s’engage pour les pourparlers de paix ».



« Les pourparlers peuvent uniquement être compromis s’il y a la guerre à Garamba », a ajouté Yusuf Adek, membre de l’équipe de négociation de la paix de l’ARS. « La simple défection ne nous arrêtera pas dans ce que nous sommes en train de faire ».



Le ministre de l’intérieur Ruhakana Rugunda a déclaré que le gouvernement avait accueilli favorablement les défections de l’ARS, mais a ajouté que les pourparlers de paix sont maintenus.



Ojul a indiqué que la déclaration du Conseil de sécurité n’allait pas faire dérailler les négociations et que les négociateurs n’ont pas encore décidé sur la manière dont ils vont procéder avec les actes d’accusations de la CPI.



« Nous sommes actuellement en consultation avec les victimes de crimes de guerre et d’autres parties prenantes quant aux mécanismes à utiliser pour s’attaquer à la question de la CPI. Pour le moment, le Conseil a raison », a indiqué Ojul par rapport à la déclaration onusienne.



Rugunda est d’accord avec le principe de la justice mais il a indiqué à l’IWPR que « la déclaration de l’ONU est en contradiction avec l’accord que nous avons déjà signé à Juba sur la responsabilité et la réconciliation ». L’Ouganda a en effet donné son accord à l’exercice d’une justice qui ne comprend pas la CPI.



« Le gouvernement ougandais ne tolérera pas l’impunité. Nous garantirons la justice et la responsabilité. Pour le moment, l’ARS et le gouvernement conduisent des consultations avec des Ougandais sur les mécanismes à utiliser pour s’assurer que la question de l’impunité soit abordée ».



Les commentaires d’Obita ont donné un certain espoir à certains habitants du nord que les pourparlers allaient aboutir au début de l’année prochaine.



« Nous voulons vraiment retourner dans nos villages. Nous sommes fatigués d’être dans les camps à cause de cette guerre », a déclaré Ronnie Okello, 62 ans.



Betty Amongi, une parlementaire de la ville d’Apac, a accueilli favorablement la date butoir de l’ARS. « Cela donne confiance aux gens qui souffrent dans les camps », a-t-elle indiqué.



Rugunda a également exprimé son approbation de la date butoir. « En tant que gouvernement nous nous engageons à la conclusion rapide des pourparlers et à la signature de l’accord de paix final », a-t-il indiqué.



Cependant, l’assistant présidentiel chargé du nord de l’Ouganda, Richard Todwong, est moins optimiste. « C’est très difficile pour la délégation de l’ARS de parler au nom de Kony. Je ne pense pas qu’ils soient si proches que cela de Kony », a indiqué Todwong.



Entre-temps, Kony s’est excusé via son équipe de négociation de la paix, envers les déplacés internes de la région de Lango pour les atrocités, la souffrance et la douleur que ses combattants leur ont infligé.



« Kony m’a envoyé demander pardon pour la peur et les abus qu’il a exercé sur les gens. Il le regrette », a déclaré Obita. « Il va aussi venir s’excuser devant vous [les victimes] ».



Ojul a ajouté que Kony est d’accord pour être traduit devant la justice traditionnelle tribale pour ses crimes de guerre et crimes contre l’humanité.



Ojul a déclaré que Kony lui avait dit « Je reconnais mes erreurs. Je veux être puni pour les crimes de guerre et crimes contre l’humanité que j’ai commis envers vous, par des moyens traditionnels ».



L’avocat et membre de l’équipe de négociation de la paix Chrispus Ayena Odongo a indiqué cependant que Kony a refusé de quitter la jungle en raison des actes d’accusation de la CPI.



« Kony ne veut pas être jugé par la CPI. Il veut être jugé au moyen des méthodes traditionnelles des Acholi, Lango et Teso », a indiqué Ayena.



Ayena a exhorté les réfugiés à demander à la CPI d’abandonner les actes d’accusation.



Samuel Okiror Egadu est journaliste en Ouganda.

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