Kampala se prépare à frapper les rebelles

Museveni et Kabila sont tombés d’accord pour expulser l’ARS de l’est du Congo.

Kampala se prépare à frapper les rebelles

Museveni et Kabila sont tombés d’accord pour expulser l’ARS de l’est du Congo.

Thursday, 13 September, 2007
Le gouvernement ougandais est sur le point d’envoyer des troupes dans la région voisine troublée de la République démocratique du Congo, RDC, dans le but d’expulser des guérillas rebelles de l’Armée de résistance du seigneur, ARS.



Le président ougandais, Yoweri Museveni et son homologue congolais Joseph Kabila ont signé un accord en Tanzanie le 8 septembre, qui verra une force conjointe de l’Ouganda et du Congo, soutenue par des soldats de l’ONU, tenter d’expulser les combattants de l’ARS du Parc National congolais de Garamba avant la mi-décembre.



L’accord, atteint après deux jours de négociations dans un pavillon montagneux à Ngurdoto, près d’Arusha, ville du nord de la Tanzanie, a fait suite à de nombreuses tensions frontalières entre les deux pays. Quatre personnes, trois Ougandais et un ouvrier pétrolier britannique, furent tuées dans des raids du Congo, et le ministre de la défense ougandais, Crispus Kiyonga menaça d’une invasion unilatérale du Congo pour atteindre l’ARS et d’autres groupes rebelles.



Les chefs de la rébellion de l’ARS au nord de l’Ouganda, qui a duré 21 ans et vu au moins 100 000 personnes mourir et 1,7 millions devenir des réfugiés à l’intérieur de leur propre pays, ont fui leurs anciennes bases au Sud du Soudan, vers le Parc national de Garamba, dans le nord est du Congo.



Les 5000 kilomètres carrés de savane et de forêt de Garamba sont classés au patrimoine mondial de l’Unesco et constituent le dernier refuge sauvage pour la race en danger critique des rhinocéros blanc d’Afrique. Les rhinocéros ont été sévèrement chassés par l’ARS et d’autres maraudeurs. Au dernier recensement, seul cinq spécimens subsistaient, d’un nombre de départ estimé à 1200 en 1960. Outre les conséquences politiques de l’attaque planifiée sur Garamba, des conservateurs de la faune internationale attendent impatiemment de voir si le mammifère le plus menacé de la planète peut être sauvé de l’extinction.



La Cour pénale internationale, CPI, à La Haye a délivré des mandats d’arrêt pour les principaux commandants de l’ARS, qui se trouveraient dans le camp de Garamba. Les mandats soutiennent que le chef de l’ARS, Joseph Kony, son adjoint, Vincent Otti, et les commandants Okot Odiambo et Domenic Ogwen « se sont engagés dans un cycle de violence [au nord de l’Ouganda] et ont établi un modèle de brutalisation des civils par des actes incluant le meurtre, l’enlèvement, la mise en esclavage sexuel, la mutilation, ainsi que des incendies de masse des maisons et le pillage des camps ».



Un mandat d’arrêt a été délivré contre un cinquième homme, Raska Lukwiya, mais il a été tué dans un combat au nord de l’Ouganda l’année dernière.



Le document contenant les charges prétend aussi que Kony et ses hommes auraient enlevé des civils, y compris des enfants, qui furent « recrutés » de force comme combattants, porteurs, et esclaves sexuels pour servir l’ARS.



L’accord surprise de Ngurdoto est arrivé juste après que Kiyonga ait averti ses concitoyens de se préparer à des combats renouvelés au Congo, au cours d’une réunion pour le comité de défense du parlement, à Kampala, la capitale de l’Ouganda.



Kiyonga a indiqué que les cibles militaires incluraient quatre autres groupes outre l’ARS.



Il a désigné les autres cibles potentielles comme étant l’Armée de rédemption du peuple, PRA, les Forces démocratiques alliées, ADF, l’Armée nationale de libération de l’Ouganda, NALU, et les Interahamwe.



La menace du ministre de la défense est intervenue à la suite de rapports de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés que quelque 35 000 Congolais ou plus avaient fui vers l’Ouganda suite à de nouveaux combats dans l’est du Congo entre des milices locales, des soldats rebelles et l’armée nationale.



Le Programme alimentaire mondial de l’ONU a fait une déclaration selon laquelle les combats dans la province du Nord Kivu, à l’est du Congo, font obstacle aux efforts visant à envoyer de la nourriture à des gens déjà appauvris par la situation d’urgence interminable du Congo. « Il s’agit d’une vraie crise qui empire », a déclaré Claude Jibidar le directeur adjoint du programme alimentaire mondial, PAM. « Les combats déracinent plus de gens chaque jour et complique la tâche du PAM, de leur apporter l’aide dont ils ont besoin d’urgence ».



Le PRA est un groupe rebelle mystérieux basé dans l’est du Congo. Il a été fondé par des officiers rebelles de l’armée ougandaise. En décembre 2004, l’armée ougandaise a déployé ses troupes le long de la frontière avec le Congo, affirmant que le groupe rebelle se préparait à attaquer l’Ouganda. Le chef du principal parti d’opposition ougandais, le Forum pour le Changement démocratique et principal adversaire du président Museveni lors des élections de 2006, fut arrêté en novembre 2005 et accusé d’être le « chef politique du PRA », ce qui a provoqué des manifestations et de violentes émeutes en son soutien. Besigye a nié tout lien avec le PRA, et a même accusé le gouvernement d’inventer l’existence de ce groupe rebelle.



L’ADF est un groupe islamique basé au Congo qui a périodiquement pénétré les montagnes couvertes de jungle de Ruwenzori, dans le sud-ouest de l’Ouganda. A partir de 1996, l’ADF s’est transformé en une force rebelle puissante – assistée par le gouvernement soudanais – mais en 1999, les forces armées ougandaises ont commencé à prendre la main et en 2001, ils ont vaincu le groupe. Mais en 2005, il était de nouveau opérationnel en tant que force efficace, selon des responsables de la sécurité interviewés par l’IWPR.



« La longue absence d’un gouvernement central au Congo, handicapé par une force de maintien de la paix de l’ONU sans mandat fort pour désarmer et réintégrer les combattants, a donné à l’ADF le temps de se regrouper », a indiqué le Colonel James Mugira, le directeur adjoint du renseignement militaire ougandais.



Selon Mugira, l’ADF a reçu des fonds, un entraînement opérationnel, et des armes telles que des armes d’assaut de modèle Kalashnikov, des mortiers et de l’équipement pour faire des bombes, fournis par des groupes islamistes fondamentalistes originaires de pays arabes.



Le NALU, formé en 1988, a été engagé dans le conflit armé avec les Forces de défense populaires de l’Ouganda, FDPU, dans les régions ouest et nord du pays dans le but de renverser Museveni. En 1998, un attentat suicide présumé a tué trente personnes passagères d’un bus à Kampala. Même si les activités de la NALU ont été minimales ces cinq dernières années, le groupe est toujours considéré comme intact. Il a récemment fusionné avec l’ADF et déplacé son QG plus dans les terres au Congo.



Les Interahamwe (un mot Kinyarwanda signifiant « ceux qui se battent ensemble ») est une organisation paramilitaire Hutu qui a bénéficié du soutien du gouvernement rwandais dominé par les Hutus, avant, pendant et après le génocide rwandais de 100 jours en 1994. Une majorité des meurtres rwandais fut perpétré par les Interahamwe. Suite au renversement du gouvernement rwandais a dominance hutue, les Interahamwe se sont enfuis dans l’est du Congo.



La première préoccupation de l’Ouganda, cependant, reste l’ARS, avec laquelle il a entretenu une paix ténue depuis l’année dernière.



« L’Ouganda a suggéré au Congo que sa propre armée, les Forces de défense populaires de l’Ouganda entre en RDC et travaille avec l’armée congolaise pour nettoyer le désordre causé par ces forces négatives », a déclaré le Dr Kiyonga lors de sa réunion parlementaire. « Si le Congo et les Nations Unies ne peuvent pas empêcher ces forces négatives de nous attaquer, les FDPU le feront et cela sera fait selon les lois de ce pays ».



Kiyonga a indiqué que le gouvernement ougandais avait, à de nombreuses occasions, suggéré des solutions au problème. « Nous discutons. Mais s’ils (les Congolais) n’écoutent pas, nous avons la capacité et le mandat de défendre notre peuple. Je dois rassurer notre peuple pour qu’il ne perde pas espoir dans son pays ».



Jacqueline Kyatuhaire, membre du parlement pour la région de Kanungo, dans l’extrême sud ouest de l’Ouganda, près du lac Edward, voulait savoir quelles mesures le ministre de la défense prenait pour améliorer la sécurité dans sa circonscription, suite à des attaques transfrontalières en août qui avaient conduit à la mort de quatre personnes.

Elle a indiqué que ses administrés étaient dans un état de grande anxiété quant à l’éventualité de prochaines attaques.



Parlant à l’IWPR après la réunion, Kiyonga a indiqué que l’attaque sur le lac Albert avait été menée par des soldats congolais, alors que celle de Butugota était l’œuvre des Interahamwe.



Kiyonga fit observer que la découverte de pétrole au nord du lac Edward, dans la région du lac Albert, avait intensifié les tensions le long de la frontière non délimitée entre l’Ouganda et le Congo.



Selon l’accord de Ngurdoto, Museveni et Kabila se sont entendus pour que les champs de pétrole situés le long de leur frontière commune soient explorés et exploités conjointement et que les coûts et les gains soient partagés proportionnellement.



Bill Oketch est un collaborateur de l’IWPR en Ouganda.
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